Au Japon, les religions sont plus des pratiques culturelles issues des traditions que de réelles croyances. Alors que le bouddhisme cohabite paisiblement avec le shintoïsme, les cultes religieux se mélangent et se complètent harmonieusement.
Le bouddhisme au Japon est une religion importée de Chine et de Corée, basée sur les enseignements du Bouddha. Au 6e siècle, la philosophie indienne est adoptée à la sauce japonaise en fusionnant avec les croyances shintoïstes. A travers les différentes époques, de nombreux courants émergent, donnant naissance à 13 écoles de bouddhisme.
Découvrez cette religion ou « voie de la sagesse » très ancrée dans la culture japonaise.
🇯🇵 Le bouddhisme, une religion importée
Source photo: https://think.iafor.org/arrival-acceptance-buddhism-japan/
Alors que le shintoïsme est la religion native du Japon, le bouddhisme arrive assez tard dans l’archipel sous l’influence de la Chine et de la Corée. Au fil du temps, il s’adapte au pays et à ses traditions tout en évoluant à travers la culture nippone.
Comment le bouddhisme est-il arrivé au Japon ?
La doctrine bouddhiste est arrivée au 6e siècle au Japon, alors que le shintoïsme était la religion dominante du Pays du Soleil Levant. Après s’être diversifié dans les pays voisins, le bouddhisme débarque dans l’archipel avec les courants taoïste et confucianiste.
Selon le Nihon Shoki (compilation de textes sur les origines et l’Histoire du Japon), la philosophie bouddhiste fut présentée à l’empereur Kimmei par le roi coréen du royaume de Paekche. Ce dernier lui avait alors offert une statue de Boudhha, suivie d’écritures bouddhiques et d’une lettre expliquant les mérites de la religion.
Les notions d’éveil spirituel, de cycle de vie et de mort en passant par la réincarnation, étaient jusqu’ici très éloignées des croyances du peuple japonais. Par ailleurs, la « voie du bouddha » ou Butsudo séduisait par sa nouveauté et certains clans locaux y voyaient une réelle source de pouvoir.
L’évolution du bouddhisme sur l’archipel
Peinture représentant le prince semi-légendaire Shōtoku (574-622), premier grand parrain du bouddhisme au Japon. Source: wikiwand.com
A la fin du 6e siècle, après des luttes acharnées entre les adeptes du shintoïsme et les partisans du bouddhisme (et de la culture chinoise), la religion bouddhique fut adoptée par la Cour impériale sous l’influence du puissant clan Soga.
Plus tard, la doctrine est déclarée religion d’État, donc au service des autorités, pour protéger le pays et faire régner l’ordre dans la population. Son rôle : sécuriser et diriger.
Au siècle suivant, elle s’imposa largement dans le pays grâce au Prince Shotoku. Ce dernier, nommé Régent sous le règne de l’impératrice Suiko est considéré comme le fondateur du bouddhisme au Japon et fit bâtir de nombreux temples dans l’archipel. Shotoku-Taishi est également connu pour avoir commenté divers sutras.
Au début de son intégration, le bouddhisme est particulièrement influencé par la pensée chinoise. Loin des théories philosophiques, il est alors connu pour ses pouvoirs protecteurs plus ou moins magiques contre les maladies, les catastrophes naturelles ou autres menaces.
A travers les siècles, de nombreuses écoles et sectes bouddhistes apparaissent. On distingue 3 courants majeurs : hinayana, mahayana et vajrayana.
🏫 Bouddhisme japonais : les différentes écoles
La pagode orientale de l'Enryaku-ji, siège de l'école bouddhiste Tendai au Japon. Source: youinjapan.net
Il existe treize principales écoles de bouddhisme au Japon.
Les écoles de l’époque Nara
- Hosso : « école de la conscience pure », introduite par le moine Dosho
- Kegon : « école de la guirlande de fleurs », importé par le moine Shen-Hsiang
- Ritsu : « école de la discipline » instaurée par le moine chinois Jianzhen
Les écoles de l’époque Heian
- Tendai : « école du Mont Tientai », courant bouddhisme ésotérique très connu au Japon, fondée par le moine Saicho
- Shingon : « école de la Parole vraie » ou grande école tantrique importée de Chine par le moine Kukai
Les écoles de l’époque de Kamakura
- Bouddhisme de Nichiren : « école du lotus » introduite par le moine Nichiren
- Jodo : « école de la Terre Pure » très répandue au Japon, issue du moine Tendai Honen
- Jodo shin : « école véritable de la Terre Pure » est un courant majeur du bouddhisme issu de la Terre Pure et créé par Shinran
- Yuzu nenbutsu : « école de l'Attention Mutuelle au Bouddha », branche de bouddhisme japonais de la Terre Pure
- Ji : « école de l’heure » qui fait partie des doctrines amidistes de la Terre Pure.
- Rinzai : école de bouddhisme initiée par Myoan Eisai, le premier maître zen japonais très apprécié des guerriers
- Soto : école principale du bouddhisme zen japonais importé par Dogen Zenji, qui s’appuie sur la méditation silencieuse
- Obaku : école de bouddhisme zen japonais la plus récente, fondée par le moine Ingen Ryuki
Le bouddhisme ésotérique japonais
Source photo: amis-musee-cernuschi.org/bouddhisme-esoterique/
Le bouddhisme ésotérique est issu de l’école Shingon et de certaines branches de l’école Tendai. L’enseignement ésotérique, relève du courant vajrayana ou bouddhisme tantrique qui provient du Tibet. Toutefois, le tantrisme japonais intègre des pratiques shinto. Le bouddhisme ésotérique japonais met l’accent sur les pratiques magiques avec les mantras et les dharanis, réputées pour leurs pouvoirs protecteurs.
Le bouddhisme zen japonais
Il s’agit d’une branche du courant mahayana qui met en avant la méditation et la posture d’éveil de Siddhārtha Gautama, dite zazen. Le zen est fondé sur le Chan, une méditation indienne venue de Chine. C’est aussi la forme de bouddhisme la plus connue en Europe.
Le bouddhisme zen japonais n’a qu’un seul objectif : atteindre l’éveil spirituel par une pratique physique et mentale.
🧘 La pratique bouddhiste au Japon
Aujourd’hui, de nombreux Japonais se disent laïques et continuent pourtant leurs pratiques religieuses. Le mouvement moderne du bouddhisme japonais Soka Gakkai ou forme laïque du bouddhisme Nichiren traduit bien cette nouvelle conception de la religion au Japon.
Les temples et les moines
Temple Senso-ji, le plus ancien temple bouddhiste de la capitale. Source: Wikipedia
Au Japon, il existe de nombreux temples bouddhiques. Avec les sanctuaires shinto, ces bâtiments religieux sont les plus répandus. Le mot « temple » se traduit par « tera » ou « jiin » en japonais, aussi, leur nom comporte le suffixe -dera ou -ji. Ils se reconnaissent à leur grand toit et à leur porte à étage (romon). Toutefois, avec le syncrétisme bouddhique, de nombreux temple empruntent des éléments architecturaux shinto comme les tori, et inversement.
Parmi les temples les plus renommés du Japon, on peut citer le Kiyomizu-dera dédié à la déesse de la miséricorde et le Senso-ji : le plus ancien temple bouddhiste de la capitale. Le Kinkakuji Temple aussi nommé Pavillon d’or et ses jardins paradisiaques sont également très célèbres et attirent de nombreux visiteurs venus du monde entier.
De toute l’Histoire du bouddhisme japonais, Kukai est sans doute le moine le plus connu. Il a fondé l’école Shingon qui est tres répandue aujourd’hui. On peut dire que son esprit a considérablement influencé la culture japonaise. Kukai a également fait construire le monastère du mont Koya où de nombreux pèlerins viennent chaque année.
Dokyo, adepte de la secte Hosso-shu était également une figure politique très importante au 8e siècle, réputé pour sa mauvaise influence au sein de la Cour.
Le moine guerrier Benkei demeure une figure du folklore japonais et un personnage du théatre kabuki et No. Il aurait été le complice du grand Minamoto no Yoshitsune, un samourai illustre de l’histoire du Japon.
De même, le moine Takuan Sôho, de l’école Rinzai-shu est connu pour avoir été le maître de Musachi Mioyamoto, grand escrimeur japonais.
D’autres moines sont également célèbres au Japon comme Ikkyu-Sojun, artisan de l’école Rinzai, connu pour ses poèmes.
L’influence du bouddhisme sur la culture japonaise
La cérémonie du thé japonaise & bouddhisme zen. Source: WikiCommons
Le bouddhisme a largement influencé la culture japonaise. Il transparaît dans les arts, l’architecture ainsi que dans le mode de vie local. Ainsi, on retrouve son héritage dans la civilisation nippone à travers le code d’honneur des guerriers et dans les arts martiaux comme le Kyudo ou le kendo.
De même certaines traditions japonaises proviennent du bouddhisme comme la célèbre cérémonie du thé. Alors que le shintoïsme considère la mort comme la fin de l’existence, le bouddhisme offre une autre perception de cet événement avec la présence d’un au-delà et du principe de réincarnation. Par ailleurs, la religion bouddhique est encore très pratiquée au Japon lors des cérémonies funéraires.
Les arts se sont également inspirés de la voie de la sagesse à travers la calligraphie japonaise, le théâtre No ou encore l’art floral Ikebana sans oublier les jardins zen.
Pour conclure, le bouddhisme au Japon trouve sa place au côté des idéologies shinto. Plus qu’une religion, c’est une philosophie qui à travers les siècles a apporté une grande richesse à la culture japonaise.