La délicatesse et l’élégance sont des qualités très appréciées dans les arts traditionnels japonais. Au sommet du raffinement, l’Ikebana ou composition florale nippone est une pratique artistique très répandue au pays du soleil levant.
L’Ikebana (生け花) est un art floral japonais qui permet de créer une structure naturelle décorative aux lignes épurées et à connotation spirituelle. Véritable œuvre vivante qui unit l’Homme au ciel à travers la nature, l’ikebana est un trésor inestimable.
Découvrez les origines et les usages de cette discipline florissante en Europe où l’harmonie est le maître mot.
🌺 Définition de l’Ikebana
L’arrangement floral nommé Ikebana ou Kadô au Japon est un art traditionnel apparu avec l’arrivée du bouddhisme au 7e siècle dans l’archipel. Mélange de symbolisme, de philosophie et d’expression créative, l’Ikebana est un hommage à la nature. Son nom signifie « art de faire vivre les fleurs ». D’abord réservée à des usages religieux, la pratique de la composition florale se développe et devient un art à part entière au même titre que la peinture ou la sculpture au Japon. Au fil du temps, plusieurs courants artistiques contribuent à l’évolution et à l’essor de ce loisir créatif.
Crédit Photo : Otomodachi / Retouches : Univers du Japon
Contrairement aux usages occidentaux, l’arrangement floral à la Japonaise ne se concentre pas uniquement sur la beauté des fleurs qui composent le bouquet, mais valorise l’intégralité de la structure.
Chaque élément à son importance : le vase, les tiges, les branches, le feuillage et les fleurs. Adepte du minimalisme, l’Ikebana privilégie la qualité à la quantité. Les lignes et les formes sont travaillées pour respecter les codes esthétiques et spirituels de l’art floral nippon. La Terre, l’Homme et le Ciel sont toujours représentés à travers les sculptures végétales.
Plus qu’un joli bouquet de déco d’intérieur, l’Ikebana transmet une véritable émotion à celui qui contemple la création. Comme de nombreuses disciplines japonaises, l’Ikebana ou « La voie des fleurs » s’inscrit dans une philosophie inspirée directement de la nature. Cet art très respecté au Japon fascine de plus en plus l’Occident.
🐣 Origines de l’art floral japonais
On sait combien les Japonais apprécient la nature de par leurs religions ou leurs croyances. Malgré le développement de l’urbanisation, le lien avec l’univers reste fort et les habitants de l’archipel aiment s’entourer de végétaux et de fleurs. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que la décoration florale ait gagné le cœur des habitants de l’archipel.
Estampes japonaises mettant en scène l'Ikebana (artistes : Utagawa Toyokuni à gauche, Shiro Kasamatsu au centre, Kitagawa Utamaro à droite)
L’Ikebana fait partie de l’héritage du bouddhisme importé au Japon vers le Ve siècle. En Inde, lors des cultes religieux, des fleurs étaient disposées autour de l’autel pour honorer Bouddha. Cette tradition se perpétua au pays du soleil levant par le biais des moines bouddhistes japonais qui décoraient les temples.
Vers le VIIIe siècle, ces derniers se mirent à agencer de beaux bouquets de fleurs en suivant des principes religieux très précis. Plus tard, l’aristocratie s’inspira de leurs créations pour décorer leurs intérieurs. L’ikebana devient un art codifié réservé à la noblesse. Seuls les moines, les shoguns, les samouraïs et les hommes de haut rang avaient accès à cette forme d’expression créative. Ce n’est qu’au cours du XVe siècle que l’Ikebana s’étend à toutes les classes sociales.
🙋 Les différentes écoles d’Ikebana
Parmi les nombreuses écoles d’Ikebana au Japon, les plus connues sont : Ikenobo, Ohara et Sogetsu.
École Ikenobo, la plus ancienne
La première école et la plus ancienne fait référence à la lignée de moines de la famille Ikebono qui perpétue la tradition de l’art floral japonais depuis le 7e siècle. Véritable maître de la composition florale, Senmu fut le premier moine à enseigner l’art de l’arrangement floral dans le temple de Rokkakudo.
Parmi ces héritages, le Tatebana, une sculpture florale fondée sur des principes religieux évoquant des notions abstraites telles que l’éternité ou encore la relation entre l’Homme et son environnement.
Compositions florales selon l'école Ikenobo (source : www.maivan.flowers)
Petit à petit, les bouquets sortent des temples pour éclore dans les rues lors des cérémonies et des fêtes nippones. En 1445, le plus vieil ouvrage régissant les usages de l’art floral japonais apparaît. Il s’agit du Sendenshô, une compilation de 53 arrangements à concevoir en fonction des événements de la vie. Chaque composition de fleurs correspond à une cérémonie particulière au Japon comme le mariage, le Nouvel An ou encore la fête des garçons.
Peu après, le maître Senkei Ikenobo instaure les règles de composition florale. Il devient célèbre en créant les combinaisons de forme triangulaire nommées Rikka, une grande référence pour la décoration florale des châteaux au Japon. Par ailleurs, le style Rikka demeure très populaire aujourd’hui.
Parmi les différents styles de l’Ikebana du XVIIè siècle, on peut noter le Nageire, issus de la cérémonie du thé ou encore le courant Wabi qui prône le retour à l’essentiel. Au cours du 18e siècle, la pratique de l’Ikebana se démocratise. Les femmes ont alors le droit d’exercer l’art floral jusqu’ici réservé aux hommes. Ainsi, le style Shoka se développe avec sa forme trinitaire et sa philosophie Ying Yang.
École Oharan, une version plus moderne
L’école Ohara apparaît au 19e siècle avec le mouvement Moribana qui propose une version plus moderne de l’Ikebana tout en incluant des fleurs occidentales. Son fondateur, Unshin Ohara révolutionne les codes de I’art floral en incorporant l’utilisation de pique-fleurs dans ses combinaisons, ainsi que des coupes plates et des végétaux colorés.
École Sogetsu, un style plus libre
Enfin, l’école Sogetsu fondée en 1927 par Sofu Teshigahara rompt avec les conventions traditionnelles de l’Ikebana en mettant l’accent sur la personnalité de l’artiste. Les créations se parent de nouveaux matériaux (tissus, écorce, verre…). Ce style plus libre se distingue par sa verticalité et ses lignes obliques. Les arrangements floraux ressemblent d’avantage à des sculptures artistiques.
🍁 Comment réaliser une composition d’Ikebana
L’Ikebana se trouve dans les maisons, les lieux publics et les édifices religieux. De nombreux Japonais pratiquent l’Ikebana pour garder un lien avec la nature au sein de leurs habitations. Toutefois, ce loisir créatif fleurit dans le monde entier.
Si vous aimez la décoration d’intérieur et la philosophie qui émane de l’Ikebana, sachez que cet art est accessible à tous. Vous souhaitez réaliser de beaux centres de table pour une occasion particulière ou quelques compositions originales ? Pour cela, pas besoin d’être un fleuriste émérite. Il faudra simplement vous munir d’un plan de travail, de fleurs fraîches, d’éléments naturels et de quelques outils comme un sécateur, des ciseaux et un pique-fleurs (sorte de support pour maintenir les branchages).
Bien sûr, vous devez vous initier aux principes de bases qui caractérisent l’Ikebana. L’asymétrie, la simplicité, l’harmonie, l’utilisation des lignes et du vide sont les fondamentaux de cette discipline artistique. De même, vous devez veiller à mettre en valeur l’ensemble de la structure.
Mode d’emploi de l'Ikebana
Choisissez un joli contenant comme un vase en céramique, une souche en bois ou autres éléments naturels. Les plantes devront être sélectionnées en fonction du message que vous souhaitez délivrer. Renseignez-vous sur leur symbolisme dans la culture japonaise et optez pour des fleurs de saison élégantes et authentiques.
👉 Au Japon, il existe un langage des fleurs, appelé Hanakotoba. Découvrez-en plus sur la signification cachée des fleurs au Japon. |
Vous trouverez des fleurs de cerisier, de lys, de pivoine et de jolies branches de noisetier au printemps ; des roses, du lotus ou des hibiscus en été ; des chrysanthèmes, des orchidées, des feuilles flamboyantes de cornouiller ou de vigne vierge en automne et enfin des daphnés ou du chèvrefeuille en hiver.
Ajoutez des éléments de textures et de taille variés tels que de la mousse végétale, des graminées et des bourgeons.
Le ciel sera le point culminant de votre composition, représenté avec une branche rigide par exemple. Au milieu, une jolie fleur pourra symboliser l’homme. Plus bas, disposez des végétaux afin de représenter la Terre. N’oubliez pas, pour une composition réussie, la sobriété est de mise.
Anciennes photos colorisées de jeunes japonaises pratiquant l'Ikebana.
☀ La philosophie de l’art floral japonais
Vous connaissez maintenant les préceptes de l’Ikebana qui vont de pair avec la philosophie zen. Plus que l’esthétisme, c’est la recherche de sens et les symboles qui rendent l’art floral japonais si fascinant. Aussi, l’Ikebana est porté par la vénération de la nature émanant de la culture nippone. Les sculptures suivent le cycle des saisons tout en représentant la vie dans sa forme la plus pure, du bourgeon à la feuille morte.
🧘♂ L’art de méditer avec les fleurs
Cette forme d’expression artistique se rapproche de la méditation dans le sens ou l’artiste doit se concentrer sur ce qu’il ressent au moment présent pour faire appel à sa force créative en lien avec sa propre vérité… Ainsi, en pratiquant régulièrement cet art floral, vous allez aiguiser votre sens de l’observation. Véritable connexion entre l’homme et la nature, l’Ikebana saura élever votre conscience de l’univers tout en libérant votre énergie créatrice.
4 commentaires
STE-MARIE
« École Ikenobo, la plus ancienne. La première école et la plus ancienne fait référence à la lignée de moines de la famille Ikebono» Ikenobo ou Ikebone faudrait savoir…
« École Ikenobo, la plus ancienne. La première école et la plus ancienne fait référence à la lignée de moines de la famille Ikebono» Ikenobo ou Ikebone faudrait savoir…
Drijvers
Bonjour, j’ai besoin d’un sécateur pour ikebana, pouvez vous me dire où m’en procurer ? 🙏
Bonjour, j’ai besoin d’un sécateur pour ikebana, pouvez vous me dire où m’en procurer ? 🙏
Dembour Marie-Agnès
Très synthétique et très intéressant. Grand merci.
Petite erreur à rectifier, l’école Sogetsu a été créée en 1927 et non 1957.
Très synthétique et très intéressant. Grand merci.
Petite erreur à rectifier, l’école Sogetsu a été créée en 1927 et non 1957.
Boulanger Maïté M-T