Pour comprendre la culture japonaise, il faut d’abord s’intéresser aux religions qui dominent le pays : le shintoïsme et le bouddhisme. Si la première a été importée par les Chinois et les Coréens, la seconde est native de l’archipel.
Le shintoïsme est une religion japonaise polythéiste issue des croyances animistes et chamaniques du Japon ancien. Signifiant « voie des dieux » le shinto vénère les esprits de la nature ou kami.
Focus sur la religion la plus vieille de l’histoire du Japon.
🤓 Le shintoïsme au Japon, religion ou philosophie ?
Le shintoïsme n’est accompagné d’aucun code moral ni livre sacré contrairement aux religions monothéistes les plus connues qui ont été instaurées par des prophètes. C’est un culte qui s’est développé naturellement à partir des traditions et des croyances du peuple japonais. Les rituels et le profond respect pour les kamis sont des éléments fondamentaux dans cette religion que chacun pratique comme il veut.
De même, les adeptes ne sont pas soumis à un seul culte. Ainsi, le shintoïsme se marie bien avec d’autres religions comme le bouddhisme, le confucianisme, le taoïsme ou le christianisme. A noter qu’au Japon, il est courant d’avoir plusieurs religions à la fois.
Le shintoïsme ne repose sur aucun dogme particulier toutefois, on peut citer deux textes de références : le Kojiki et le Nihon Shoki parus au début de la période Nara. Ce sont des compilations de mythes sur la cosmogonie du Japon et l’origine des divinités shinto dans lesquelles on retrace la descendance divine de l’empereur.
🧜♂️ Les Kamis et la mythologie japonaise
Amaterasu émergeant de la grotte céleste de roche (Shunsai Toshimasa, 1887). Source : wikipedia.
Le shintoïsme au Japon se fonde sur le culte des kamis (les dieux japonais). Ce sont les entités supérieures ou esprits de la nature qui règnent sur le monde et imposent le respect (ou la terreur). Les éléments de la nature comme les arbres, les rochers, les animaux sont des kamis. De même, les esprits des ancêtres, des grands chefs ou encore des empereurs disparus sont considérés comme des divinités dans le culte shintoïste.
Les divinités shinto sont au cœur de la mythologie japonaise. Comme nous l’avons vu, le Kojiki et le Nihon shoki sont des recueils de mythes et de légendes qui décrivent l’origine des kamis. Dans le premier, on retrouve le couple démiurge Izanagi et Izanami ainsi que la déesse du soleil Amateratsu et autres déités importantes. Dans le second, on retrace l’histoire du premier empereur japonais (descendant d’Amaterasu) et de la lignée impériale.
Au Japon, les kamis sont des entités ambivalentes. Il faut les vénérer et ne surtout pas les froisser au risque de s’attirer un mauvais sort (tatari).
⛩ Les sanctuaires shinto
ise-jingu. Source : blog.gaijinpot.com
Le culte shintoïsme est très présent au Japon et de nombreux sanctuaires peuplent l’archipel. Chaque bâtiment est le lieu de résidence d’un kami.
Le Ise-jingu, Izumo-taisha et le Fushimi Inari sont particulièrement connus. Parmi les éléments caractéristiques, le torii est le portail qui délimite le monde sacré du monde profane. Il se poursuit par un escalier en pierre que l’on appelle ishidan.
Sur l’allée qui mène au bâtiment principal (sando), on trouve le chozuya, un bassin rempli d’eau avec des grandes louches qui servent à se purifier physiquement et spirituellement avant de se présenter au kami. C’est l’endroit où les fidèles se lavent les mains et la bouche pour se débarrasser de toutes souillures. Ensuite, le chemin bordé de lanternes traditionnelles mène au kagura-den (lieu de danses sacrées).
Dans l’enceinte du sanctuaire se trouve le shamusho. On y vend les ema (plaques de bois sur lesquelles on inscrit un vœu) ou les onomori (genre d’amulettes). Les emake sont la structure qui permet d’accrocher les ema. Le kami peut alors lire les prières et les exaucer.
L’entrée du haiden (lieu de culte) est gardée par les komainu (statues de lions). Une corde en paille nommée shimenawa indique le caractère sacré du pavillon. Enfin, le honden représente le bâtiment le plus important du sanctuaire. C’est l’endroit sacré où se situe la relique du kami et seuls les prêtres shinto peuvent y accéder.
🤔 L'influence du shintoïsme sur la vie des Japonais
On peut dire que le shintoïsme a déteint sur la façon de pensée et le mode de vie des Japonais. Le profond respect pour la nature, les ancêtres et le culte aux kamis sont ancrés dans la culture nippone. Les Japonais pensent qu’en chaque chose et chaque individu se trouve un kami à honorer.
D’une certaine manière, la religion relie le pratiquant à son univers, à son pays et à sa communauté. Les mariages et les naissances donnent lieu à des cérémonies shinto et l’année est rythmée par les célébrations dans lesquelles on retrouve des rituels shinto comme la fête des filles, le hanami (fête des cerisiers en fleurs) ou encore le Nouvel An.
Parmi les pratiques shinto, on peut citer les visites des sanctuaires ainsi que les rites de purification comme le lavage des mains et de la bouche pour accéder au lieu sacré. Certains gestes de propreté comme le fait de prendre une douche avant d’entrer dans un onsen (source d’eau chaude) sont également liés au culte.
Les manifestations shinto les plus populaires sont les matsuri. Il s’agit de festivals japonais en l’honneur des kamis locaux.
📖 Histoire brève du shintoïsme japonais
Comme la plupart des religions, le shintoïsme est né d’un contexte naturel et politique, avant d’évoluer à travers les siècles.
🐣 Apparition du shintoïsme au Japon
Les prémisses du culte shinto remontent à l’ère Jomon, il y a près de vingt mille ans. Les croyances religieuses servaient alors à expliquer les nombreuses catastrophes naturelles. Depuis toujours, l’archipel situé à la jonction de 4 plaques tectoniques est secoué par les tremblements de terre, éruptions volcaniques, tsunamis et typhons.
Les premiers peuples du Japon avaient des croyances animistes. C’est-à-dire qu’ils croyaient en l’existence d’esprits ou d’âmes qui animeraient la nature et les êtres vivants. Au fil des siècles, les Japonais ont attribué des caractères humains à ces esprits. C’est ainsi que sont apparus les kamis tels qu’on les connaît aujourd’hui.
Lorsque le bouddhisme arrive dans l’archipel vers le VIe siècle, la Cour impériale japonaise souhaite affirmer la religion autochtone et renforcer le pouvoir impérial. Ainsi, les croyances shinto ont été matérialisées dans le Kojiki en 712 puis dans le Nihon Shoki en 720. La religion ethnique est alors devenue un symbole de nationalisme.
🔎 Le syncrétisme shinto-bouddhiste
Shinbutsu-Shugo : Le mélange du shintoïsme et du bouddhisme au Japon. Source : blog.japanwondertravel.com
Quand le bouddhisme se répandit au Japon à la fin de la période Asuka, le shintoïsme a dû s’adapter et évoluer pour intégrer les nouvelles croyances au sein de sa conception spirituelle. De même, les divinités shinto ont été ajoutées au panthéon bouddhiste.
Selon Kukai, fondateur de l’école Shingon, les kamis sont des incarnations des bouddhas. A cette époque, les croyances religieuses cohabitent et fusionnent et certains n’y voient qu’une seule et même vérité. C’est ce qu’on appelle le syncrétisme shinto-bouddhiste (shinbutsu shūgō).
Les temples intégraient alors des petits sanctuaires shinto et réciproquement, des petits temples se trouvaient dans les sanctuaires. En réalité, les deux religions étaient assez complémentaires et il était donc possible de les unifier.
🎎 Le shintoïsme, une religion d'État
Ce n’est qu’à la fin de la période Edo que le shintoïsme revient en force sous l’impulsion de certains érudits japonais qui prônaient le shintoïsme pur (sans influences étrangères). Plus tard en 1868, le shintoïsme fut proclamé religion d’état sous le nouveau régime de l’ère Meji. Les prêtres shinto étaient alors au service de l’état et de l’empereur.
Rappelons que ce dernier était le descendant direct d’Amaterasu ! Il faisait l’objet d’un véritable culte jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. La défaite du Japon mit fin à la religion d’État et l’empereur dut se résoudre à affirmer publiquement qu’il n’était pas un dieu.
🎊 La religion shinto de nos jours
Cérémonie mariage shinto. Source :picture-worl.org/
Les Japonais vivent avec des croyances qui appartiennent à la fois au shintoïsme et au bouddhisme. De nos jours, ils sont nombreux à pratiquer les deux religions selon le contexte.
En règle général, les rites shinto et bouddhistes n’occupent pas le même espace. Les premiers sont liés à la vie, à la famille et à la communauté alors que le second se réserve à l’au-delà. Ainsi, l’on se rend dans les sanctuaires shinto pour célébrer les mariages, alors que les funérailles se pratiquent dans les temples bouddhistes.
Tout au long de l’année, les Japonais perpétuent les rituels shinto, notamment lors des événements traditionnels et des matsuri.
Alors, selon vous, le shintoïsme est-il une religion ou une philosophie ?
1 commentaire
daniele moutet
Merci pour toutes ces informations bienveillantes, j’aime le japon, son élégance et sa pudeur, son souci d’efficacité et son art de contemplation, sa technologie très avancée et son respect des rites millénaires. Très beau site, je vous suis fidèlement.
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